Une jeune fille est assise sur une terrasse. Le soleil fait ressortir les éclats blonds dans ses cheveux roux. Elle est assise comme si le monde lui appartenait, vêtue d’une robe de cocktail ornée de perles qui met en valeur sa peau claire. Un martini dans la main gauche, elle profite des bonnes choses de la vie. Elle est audacieuse, vive, et elle semble en bonne santé, heureuse et confiante. Elle est peut-être en vacances, ou en train de célébrer sa dernière réussite. Vous ne pourriez le deviner, mais il y a quelque chose que vous ne pouvez pas voir quand vous l’observez.
Le diagnostic inattendu
Cette fille qui porte une jolie robe de cocktail, c’est moi, et ce que vous ne pouvez voir, c’est la maladie que je combats.
Je n’ai jamais pensé que la polyarthrite rhumatoïde (PR) ferait partie de ma vie. Je n’ai jamais pensé que cela pouvait m’arriver. Pourquoi l’aurais-je fait? J’étais une danseuse : j’étais jeune, en bonne santé et en forme. Il n’y avait pas d’antécédents de PR dans ma famille – du moins pas à ma connaissance, car le souvenir des mains déformées de ma grand-mère raconte une autre histoire. Mais mes mains ne racontent pas la même chose. À première vue, elles ressemblent à celles de n’importe quelle personne en bonne santé.
Personne ne peut voir la douleur dans mes articulations ou percevoir la chaleur de l’inflammation qui parcourt mon corps.
L’arthrite est souvent qualifiée de maladie invisible parce que, la plupart du temps, nous ne pouvons pas en voir les symptômes. L’absence d’indices visuels fait en sorte que cette affection, qui peut frapper n’importe qui, à n’importe quel âge, reste largement incomprise.
Maladies invisibles : ce que l’on ne voit pas
Le centre-ville de Vancouver est rempli de gens qui se pressent sur les trottoirs étroits, qui s’esquivent les uns les autres et traversent les intersections à toute vitesse pour gagner 30 secondes dans leur journée. Pris dans le tourbillon de leur vie, ils remarquent rarement ces personnes qui font leur chemin dans le flot des passants. L’homme d’une trentaine d’années qui tient avec précaution une tasse de café alors qu’un peu de liquide chaud se renverse sur ses mains tremblantes. La jeune fille d’à peine 20 ans qui marche à l’aide d’une canne, ses chaussures de sport glissant parmi les feuilles mortes rouges qui jonchent le trottoir. L’adolescente qui admire dans la vitrine d’un magasin une charmante paire de chaussures argentées à talons hauts, tandis que sa robe délicate laisse entrevoir à ses pieds d’épaisses chaussures orthopédiques. Le petit garçon assis sur un banc dans la cour de récréation qui regarde un groupe d’enfants jouer au basket, ses doigts parcourant le plastique rigide de l’orthèse qui recouvre ses mains.
Combien de fois les remarquons-nous dans le brouhaha de nos propres vies bien remplies? Et nous-mêmes qui sommes confrontés à cette maladie chronique, reconnaissons-nous le visage de l’arthrite chez les autres?
Derrière l’écran de fumée du bien-être
La côte ouest est l’incarnation même de la santé et du bien-être. Il y a des joggeurs sur la promenade au bord de la mer, des cyclistes sur les voies aménagées, on peut y faire de la randonnée en montagne, nager dans l’océan. Il y a du kayak, du yoga chaud, du tennis, du soccer et du football américain. Notre climat doux offre une multitude d’options pour faire de l’activité physique en plein air tout au long de l’année.
Cette apparence d’une société en pleine santé fait en sorte qu’il y est difficile de vivre avec une maladie invisible. C’est pourquoi il est si important de mettre en lumière cette réalité.
Les visages de l’arthrite sont toujours présents, mais il n’est pas facile de les reconnaître. Même si je dois composer avec l’arthrite depuis plusieurs années et que j’ai échangé avec de nombreuses personnes dans mon parcours, je suis toujours étonnée de constater à quel point l’arthrite est mal comprise.
L’arthrite est aussi imprévisible qu’invisible. Souvent, nous ne savons pas comment nous nous sentirons d’un jour à l’autre. Il peut être difficile d’expliquer un changement soudain de plans à la famille et aux amis. Éprouvant de planifier nos journées en conciliant nos obligations professionnelles et familiales. Intimidant d’expliquer à nos employeurs pourquoi nous n’avons pas pu venir au travail ou pourquoi nous n’avons pas terminé une tâche à temps.
Personne ne peut voir les difficultés que nous rencontrons derrière l’écran de fumée du bien-être.
Le fait de parler de notre réalité et de raconter notre expérience par rapport à l’arthrite favorise la compréhension et la compassion au sein de notre communauté. Cela nous donne le pouvoir de façonner notre identité au-delà des contraintes liées à notre état de santé. Cela nous apprend à nous affirmer.
Célébrer nos victoires
Un vent puissant souffle aux petites heures du matin, annonçant l’arrivée officielle de l’automne. Le ciel agité laisse présager une tempête, mais soudain, les nuages se dissipent, révélant un ciel de minuit parsemé d’étoiles.
Rappelons-nous la fille en robe de cocktail : les apparences sont parfois trompeuses.
Pour moi, sensibiliser à la réalité de l’arthrite, ce n’est pas seulement reconnaître les contraintes que nous impose l’arthrite – bien que cela aussi soit important.
C’est aussi de mettre en lumière les victoires et les réalisations. Il y a beaucoup d’histoires remarquables de réussite dans la communauté des personnes atteintes de maladies chroniques. Vous ne les voyez peut-être pas, car elles ne sont pas toujours apparentes – un autre exemple d’invisibilité.
Nos vies changent avec une nouvelle maladie, mais elles n’ont pas nécessairement à changer pour le pire. Vivre avec l’arthrite n’est pas la même chose aujourd’hui qu’il y a 50 ans. Il existe de nombreuses options de traitements. Avec l’aide de professionnels de la santé, comme les physiothérapeutes et les ergothérapeutes, nous apprenons à mieux gérer notre quotidien avec l’arthrite. Nous pouvons compter sur des spécialistes et des chercheurs qui travaillent sans relâche pour améliorer notre vie, et sur une communauté de patients et de défenseurs des droits des patients qui racontent leur histoire.
En parlant ouvertement de nos expériences, nous pouvons sensibiliser le public à notre réalité, aider ceux et celles qui rencontrent des difficultés et leur montrer qu’il est possible de bien vivre avec une maladie chronique. Seulement, notre vie est un peu différente.
L’adaptation à mon propre diagnostic a été une véritable leçon de patience et de résilience. Mon diagnostic m’a obligée à ralentir et à me concentrer sur les petites choses, à vivre plus pleinement chaque moment : un rappel constant du privilège que j’ai d’être en vie. Le fait de travailler pour réaliser mes rêves me rend reconnaissante du chemin parcouru pour y arriver, et mes réalisations signifient davantage pour moi en raison des limites avec lesquelles je dois composer.
C’est pourquoi nous devons célébrer nos victoires, même celles qui nous semblent modestes. Ce sont les nôtres, et elles sont encore plus éloquentes en raison des obstacles auxquels nous faisons face.
La fille vêtue d’une robe de cocktail lutte et s’épanouit tout à la fois. L’arthrite est toujours présente, qu’elle soit visible ou non – et le plus souvent, elle ne l’est pas.
Et plus je vis avec l’arthrite, plus je me rends compte que c’est très bien ainsi.
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