Je suis dans un lounge enfumé d’un hôtel de Las Vegas, le genre dans lequel je m’imaginais chanter quand j’étais jeune. L’air est saturé d’un parfum artificiel de vanille pour masquer l’odeur de cigarettes et d’alcool. Les murmures mystérieux des joueurs et les sonneries des machines à sous voguent à travers le casino et s’échouent au bar. Le serveur m’apporte un verre de bourbon, une portion plus généreuse que ce que je me permets normalement à la maison. Mon mari sort un carton d’allumettes de sa poche et allume le cigare que nous partageons. Cette petite indulgence est l’un des nombreux péchés de la PR que je ne partage pas avec mon équipe soignante.
Les médecins nous posent toutes sortes de questions sur notre mode de vie. Plus ils en savent sur nos habitudes, mieux ils peuvent guider nos traitements pour aider à stabiliser notre maladie. Les questions standard ressemblent à :
- Quel est votre régime alimentaire?
- Mangez-vous des fruits et légumes? Combien de calcium consommez-vous chaque jour?
- Est-ce que vous fumez?
- À quelle fréquence buvez-vous de l’alcool?
- Faites-vous de l’exercice?
Je réponds au mieux de mes connaissances et j’essaie d’être le plus honnête possible, mais je garde quand même quelques petits détails pour moi.
Je ne cache pas grand-chose à mon médecin – du moins pas intentionnellement – mais il y a des moments tout au long de l’année que je ne pense jamais à mentionner, comme ce cigare occasionnel que je fume en vacances ou cette généreuse portion de spiritueux que j’ai bu dans un casino de Vegas; cette margarita épicée sur une terrasse au Nouveau-Mexique ou cette soirée passée dans un bar à chicha avec mes copines.
Avant mon diagnostic, je testais toujours mes limites. J’ai pris des risques avec mon corps sans réfléchir aux conséquences. Je n’avais pas à me soucier de la maladie ou des comorbidités. Je pouvais manger tout ce que je voulais et me faire plaisir à l’occasion. Mon métabolisme brûlait la nourriture plus rapidement qu’elle n’entrait dans mon corps. Enfant, j’étais un peu rebelle : je montais à cheval sans attendre les consignes, je conduisais des motocross sans casque, je faisais du vélo à toute vitesse sur une route escarpée. C’était mon enfance dans les années 70. Il n’y avait rien que je n’osais essayer.
Ce style de vie cavalière a changé lorsque j’ai reçu un diagnostic de polyarthrite rhumatoïde. Dorénavant, je devais faire le bilan de mes actions et reconnaître les conséquences d’enfreindre les règles de la vie avec la PR. Sans maladie chronique, rester en bonne santé est déjà assez difficile. Ajoutez une nouvelle maladie et tout à coup les règles changent. Dorénavant, je devais m’inquiéter de ma tension artérielle, de mon cholestérol, du cancer et des infections, toutes des conditions auxquelles j’étais plus à risque en raison de ma maladie auto-immune. J’avais besoin d’être plus consciente de prendre soin de mon corps. Réduire ma consommation d’alcool, ne pas fumer, éliminer la malbouffe, surveiller les interactions avec les médicaments qui pourraient entraîner des complications si je m’imprègne de ces vices qui attisent les flammes de l’inflammation dans mon corps.
Se gâter raisonnablement
Je travaille dur toute l’année pour prendre soin de mon corps, lui donner le repos dont il a besoin et le nourrir avec de la nourriture saine, de l’eau et de l’exercice, mais de temps en temps, j’ai envie de retrouver mon côté rebelle et d’enfreindre les règles.
Quand je dis enfreindre les règles, je veux simplement dire que je m’autorise quelques petits plaisirs coupables pour oublier un peu que je vis avec une maladie chronique et me souvenir du sentiment d’être invincible pendant quelques instants. Nous avons tous nos vices qui nourrissent notre désir de décadence, même s’ils sont interdits. Interdit. Quelque chose dans ce mot me donne un frisson d’excitation. C’est presque enivrant de devenir une hors-la-loi dans ma propre vie.
Ces petites rébellions me rappellent que je suis vivante, un être humain avec des imperfections et des désirs. Nous sommes tous un peu rebelles. Parfois, cela fait du bien de contourner les règles pour cette petite poussée d’adrénaline qui traverse notre corps. La seule différence est que cette fois, nous n’avons pas à nous justifier à personne, sauf à nous-mêmes.
Avoir une maladie chronique vient avec son lot de recommandations sur notre mode de vie pour maintenir notre bien-être et il y a certaines choses qui ne nous sont tout simplement pas recommandées pendant le traitement. Cependant, parfois, les habitudes et les activités que nous avons aimées au fil des ans sont exactement ce dont nous avons envie, même quand nous savons que cela aura un impact sur notre traitement. Nous voulons encore en profiter, même si nous savons qu’elles ne sont pas bonnes pour nous. On le fait tout le temps, n’est-ce pas? Nous profitons de ce petit morceau de chocolat de plus, de cette gorgée de notre spiritueux préféré ou de ce plat frit à l’occasion. Pourquoi pas? Il n’y a rien de mal à se gâter un peu, tant que c’est raisonnable.
Apprendre à contourner les règles
Savoir quand et comment contourner les règles est essentiel. C’est une compétence que nous apprenons, un peu comme lorsque nous avons dû apprendre à adapter notre vie à notre maladie. Une fois que nous connaissons ce qui déclenche une crise et apprenons à les gérer, voler quelques petits plaisirs avec modération peut être bon pour l’âme. La décadence ne doit pas nécessairement être des cigares et de l’alcool (ce sont mes propres plaisirs coupables — choisissez les vôtres), nous contournons bien souvent les règles pour profiter de la vie sans mettre notre santé en danger.
Juste pour être claire, je me livre à mes petits vices avec une modération extrême. Ce n’est pas un événement quotidien, pas même un événement mensuel. Il m’arrive que je saute une année pour ce cigare annuel, alors que ce verre de bourbon ressemble plus à un doigt à la maison. Est-ce que je mentionnerai ces choses la prochaine fois que mon médecin me le demandera? Probablement pas. À moins que cela n’interfère avec mon traitement et la prise en charge de ma maladie. Quand j’enfreins les règles, je le fais quand je suis au sommet de ma forme en termes d’activité de la maladie afin de ne pas avoir à faire face aux impitoyables conséquences.
Nous connaissons assez bien notre propre corps pour savoir ce qui se passe lorsque nous enfreignons les règles et jouons avec nos limites, mais de temps en temps, cela fait du bien de se livrer à un petit péché décadent. Maintenant, si vous voulez bien m’excuser, je pars me faire du pop-corn et un dirty martini. Ça reste entre nous, hein?
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